Abdoulaye Kourouma, le président du parti Rassemblement pour la Renaissance et le Développement (RRD) et membre de l’opposition républicaine, a accordé une interview exclusive à notre rédaction . Au cours de cet entretien, l’ex-allié du RPG Arc-en-ciel s’est déterminé sur  les violences relatives à l’installation des exécutifs communaux, le litige autour de l’application de l’accord politique du 8 août entre l’UFDG et le parti au pouvoir, la paralysie du secteur éducatif guinéen et plusieurs autres sujets ont été abordés lors de cet entretien.

Justinmore.info : L’installation des exécutifs communaux se déroule dans un climat de violences  très tendues. Quel en est votre avis ?   

Abdoulaye Kourouma : Vraiment, nous avons des problèmes. Nous, notre parti politique a des problèmes dans la préfecture de Beyla, précisément dans la sous-préfecture de  Karala. Je sais que c’est l’Etat qui est promoteur de la violence et des violations flagrantes des lois dans le pays. Dans la sous-préfecture de Karala, il y a 17 conseillers. Le parti RRD a 9 conseillers, le RPG a en 7 et l’UFDG en a 1. Ce qui veut probablement dire que nous devons gagner l’exécutif à Karala. Je m’en vais vous dire qu’on était surpris de voir l’autorité en charge d’installation de l’exécutif qui est allé avec des pickups de la gendarmerie, avec des policiers et quelques militaires dans la sous-préfecture de Karala, le 1er novembre en se dirigeant au domicile du responsable RPG arc-en-ciel. Après une vingtaine de minutes d’entretien, ils ont pris leur voiture sans poser de question pour sortir de la sous-préfecture. Après vingt  minutes, c’est sur la voix des réseaux sociaux que nous avons appris la victoire du RPG sans qu’il y ait eu une élection de l’exécutif. Lorsque la population a appris connaissance de cette nouvelle farfelue  par la voix des réseaux sociaux, elle s’est  tout de suite mobilisée et est allée au domicile du maire élu, lui retirer le tricolore, le cachet et tous les documents administratifs que cette commission avait laissés avec lui! Puis, elle a sommé le maire autoproclamé de quitter la ville. Aujourd’hui, il n’y a aucun élément du RPG à Karala, et même l’autorité n’est plus présente!

Le préfet a appris de son côté que la population est allée récupérer les documents administratifs aux mains du maire élu. Il s’est permis d’envoyer deux pickups de CMIS. Quand les policiers sont arrivés sur place, sans demander ce qui s’est passé, ils se sont mis  à lancer des gaz lacrymogènes dans le village. Et tout de suite, la population a réussi à maîtriser ces agents de sécurité et leurs pickups. Il a fallu l’intervention du président du parti (moi-même), pour ne pas qu’ils soient ligotés.   c’est ainsi que le préfet de N’Nzérékoré qui m’avait appelé pour me dire d’intervenir, puisque l’autorité avait déjà une information que la population avait maîtrisé les forces de l’ordre qui y étaient envoyées. Et moi, ils m’ont appelé d’intervenir pour ne pas qu’on puisse les tuer. C’est  à grâce à notre intervention que la population a pu libérer ces agents de sécurité et leur a demandé de quitter immédiatement  la ville.

Au jour d’aujourd’hui, il n’y a aucun élément du RPG dans cette préfecture. Ce qui traduit déjà que le parti est fort dans cette localité et que la population le soutient. Je crois que c’est le comble des violations de loi. Et s’il y a problème, c’est l’Etat reste et demeure  responsable. Mais à la base, il y a un antécédent entre le préfet et  la population de cette localité car il s’est rendu dans un petit village où il a insulté les sages, ce qui a fait l’objet d’une plainte contre lui pour injure publique et abus d’autorité,

Ce problème était pendant à la justice, il avait installé les 12 sous-préfectures sur les 13 laissant la sous-préfecture de Karala. Nous avons été rencontrer à huit reprises le gouverneur de la région administrative de N’Zérékoré, l’informer du comportement et de l’attitude du préfet de Beyla, pour le refus d’installer l’exécutif conformément à la loi dans la sous-préfecture de Karala. Chaque fois, il appelait le préfet et lui disait de passer à l’acte. Comme j’ai vu que la hiérarchie n’est pas respectée à leur niveau, j’ai appelé le directeur national de l’administration du territoire qui est monsieur FadamaItala Kourouma à cinq reprises, il m’a dit que les mesures sont en train d’être prises pour installer le maire de Karala. J’étais donc surpris que l’installation se fasse en catimini, sans qu’il n’y ait élection de l’exécutif, avec les violences dont je vous ai parlées. Je suis au regret de vous dire que ça n’honore pas l’Etat, l’administration, si aucun élément de l’administration n’existe dans une sous-préfecture, faute au non-respect de loi, c’est terrible. Donc à N’Zérékoré, nous avons réussi à avoir trois vices maires.

Justinmorel.info : Vous avez été accusé de corruption pour un montant de 50 millions de nos francs par les partis GRUP de Papa Koly et de l’UFR, dans le but de leur vendre vos voix concernant l’exécutif communal de la ville de N’Zérékoré…

Abdoulaye Kourouma : Cest pourquoi, je lance un appel aux forces vives, à la société civile et au procureur de la République de s’engager à être contre la corruption. Ce ne sont pas seulement l’UFR et le GRUP, il y a aussi le parti au pouvoir, il y a l’UFDG. Moi je suis parti à N’Zérékoré dans l’objectif de mettre l’opposition ensemble, pour qu’on gagne l’élection, pour qu’il y ait l’alternance à la base. Lorsque nous sommes arrivés, nous avons remarqué que tous les partis politiques avaient essayé de tenter de passer par la corruption de nos conseillers. Le parti au pouvoir a donné de l’argent à nos conseillers, en demandant leurs votes, l’UFR, le GRUP, aussi l’UFDG qui avaient donné de l’argent à nos conseillers …

Justinmorel.info : combien ? 

Abdoulaye Kourouma : Je ne saurais le dire personnellement. J’ai appelé un responsable de l’UFDG et je lui ai dit mais je ne comprends pas. Nous sommes dans le même cadre de concertations qu’on appelle opposition, comment se fait-il que votre parti ou les responsables de votre parti puissent donner de l’argent à nos conseillers sans que nous ne soyons consultés de voter en leur faveur ? Je vous avoue, la personne m’a répondu en me disant que le pouvoir en a fait autant. Je lui ai dit non. Vous et nous, nous combattons la corruption, l’injustice, l’insécurité dans le pays, lorsque le pouvoir est en train de faire ça, nous notre mission c’est quoi ? C’est de lutter contre cette mal gouvernance. On ne doit pas aussi continuer à faire la promotion de l’injustice et de la corruption.

Donc, ce monsieur qui est le coordinateur de l’UFR, qui m’avait personnellement demandé de donner consigne de vote à mes conseillers, et lui, et l’UFDG je leur ai dit que je ne donne pas consigne de vote. Puisque chacun de vous a joué à la corruption, donc sur ce, je ne donnerai jamais  consigne de vote. Nous avons organisé une élection primaire entre les éléments de l’opposition. J’ai même les documents avec moi, pour trouver un candidat unique au compte de l’opposition. Là, l’UFDG a gagné contre l’UFR qui n’a même pas eu le nombre de conseillers qu’il avait initialement obtenus pendant les élections.

Il était question d’accompagner l’UFDG dans la salle à tout prix, et nous étions surpris que  l’UFR s’est porté candidat contre l’unique de l’opposition. Ce qui a fait  que c’est le RPG qui a gagné à N’Zérékoré. Lorsqu’il a perdu l’élection, j’ai appris par la voix de presse qu’il aurait remis à monsieur Papa Koly Kourouma une somme de 50 millions de francs guinéens à me remettre afin que nous donnions des consignes de vote à nos militants.

Je vous avoue que monsieur Abdoulaye Kourouma n’a jamais reçu un franc venant de Papa Koly, dans le but de donner des consignes de vote à ses militants. Et, c’est ce qui m’a amené à porter plainte contre le coordinateur de l’UFR pour diffamation de caractère et calomnie. J’ai la copie de la plainte qui est avec moi, et les procédures  sont en cours normalement. Ce que je peux vous certifier ici, c’est que Papa Koly est un grand frère, nous avons une relation fraternelle.

Ce qui fait que même si les gens parlent de lui et qu’on est proche, c’est vrai, c’est mon grand frère. Ce monsieur Cécé Loua qui a demandé de voter pour lui, n’a jamais discuté un problème de soutien entre nous,  jamais ! Je me suis mis à organiser les votes entre lui et le représentant de l’UFDG.

Donc, je m’inscris en faux, j’interpelle maintenant la société civile, les forces vives, le procureur de la république, les institutions en charge de lutter contre la corruption de se lever. Sinon, le pays va devenir comme le Panama, où il faut avoir beaucoup d’argent pour faire ce que tu veux. Où les narco peuvent même diriger ou présider les communes. Voilà l’appel que je lance aujourd’hui!

Justinmorel.info : vous êtes de l’opposition républicaine, comment se fait-t-il que vos conseillers communaux votent pour le RPG dans certaines localités ?

Abdoulaye Kourouma : l’opposition en général, avait 21 conseillers sur 41. Ce qui veut dire que nous avions la majorité à N’Nzérékoré. Il y a eu un problème d’égos. En partant en candidature unique au sein de l’opposition, on avait tout de suite la majorité. Et nous, nos conseillers sont partis dans le but d’accompagner la candidature unique de l’opposition, qui était présidée ou qui devrait être Pépé Michel Zougbélémou. C’était ça le contrat, le consensus entre l’opposition. Mais on était surpris de voir dans le rang de l’opposition, qu’il y ait un deuxième candidat. C’est ce qui a donné la victoire au RPG. Donc, on n’a pas voté pour le RPG, nous avons obtenu dans notre consensus au sein de l’opposition le poste du premier vice-maire.

Nous avons été candidat au poste du premier vice maire. Mais L’UFDG s’est levé contre nous comme candidat, ainsi l’UFR, le RPG, on n’en parle pas… Nous avons gagné les élections au niveau du poste premier vice-maire.

Pour le poste de deuxième vice maire dans nos consensus, l’UFR devrait être candidat, quand il s’est porté candidat, le RPG s’est présenté, l’UFDG idem, nous n’étions pas candidat. Et, le RPG a gagné.

Au poste de troisième vice maire, on était censé à être candidat dans le contrat entre nous et l’opposition, on s’est porté candidat et tout le monde était candidat contre nous. Nous avons gagné.  Quatrième vice-maire, le Bloc Libéral (BL) était censé être candidat,  le RPG était candidat l’UFR l’était aussi, l’UFDG s’est présenté. Le RPG a gagné le cinquième vice maire, on était censé à être candidat, tout le monde s’est levé contre nous, nous avons gagné. C’est pour vous dire que nous n’avons jamais voté pour le RPG, peut être le hasard fait que notre parti se partage la commune avec le RPG.

Justinmorel.info : Aujourd’hui, l’UFDG crie à la  violation de l’accord politique du 8 août dernier. Et nous  assistons à des marches de protestions  chaque semaine de l’opposition qui  débouchent  à des violences politiques  où  parfois, il y a des pertes humaines. Quelle en est avis ?

Kourouma Abdoulaye: c’est regrettable lorsque les hommes censés diriger le pays ne respectent pas la constitution et se livrent à des accords et des consensus. Un pays normal doit se gérer avec ses lois, pas avec les accords, pas avec les consensus. Vous nous avez vu avant l’organisation de ces élections, on s’est battu contre le point 2 des accords  qui devraient vraiment nous amener où nous sommes aujourd’hui. C’est ce qu’on avait vu avant.

Mais puisque nous avons préféré passer, par les accords, que chaque parti doit respecter ses engagements. Mais ce n’est pas honorable pour une nation crédible que le pays soit géré par consensus et des accords.

C’est l’Etat qui ne joue pas sa partition, la loi est claire là-dessus. Que tu sois journaliste, politique, travailleur, l’Etat dit, lorsque vous voulez manifester, 72 heures avant informer l’autorité. L’autorité à son tour prend des dispositions pour encadrer vos manifestations, l’Etat à l’obligation d’encadrer les manifestants dans l’exercice de leur droit. Et lorsque l’état ne joue pas sa partition, voilà ce que ça donne.

Justinmorel.info : aujourd’hui, avec le bras de fer qui existe entre le SLECG et l’Etat,  cela paralyse le système éducatif guinéen. Qu’en dites-vous ?

Abdoulaye Kourouma : Qu’est-ce qu’il faut faire… l’Etat doit changer de stratégie. Je demande à l’Etat d’aller en négociation avec les syndicalistes. Je demande au premier ministre le dialogue. L’article 58 de notre constitution en fait le garant social du dialogue politique, qu’il ouvre le dialogue et qu’on discute, qu’on trouve des consensus pour que l’éducation guinéenne soit aussi crédible.

Justinmorel.info : il y a des échéances électorales qui se profilent à l’horizon notamment les législatives et la présidentielle 2020.  Est-ce que vous serez au rendez-vous  ?

Abdoulaye Kourouma : si vous prenez  quelques partis politiques guinéens, aujourd’hui, l’électorat  détermine le poids d’un parti politique. Nous venons de participer aux élections locales, sur le plan national, le parti n’est pas dans les cinq premiers, mais en tout cas, il ne quittera pas les dix premiers. En ce sens que  c’est le nombre de conseillers et la participation aux élections qui déterminent le poids électoral d’un  politique. Une manière de vous dire encore qu’aujourd’hui, nous sommes  entre les dix premiers des partis politiques reconnus légalement en Guinée.

Ce qui traduit que nous avons une base. Le nombre de conseillers que nous avons obtenus, reste et demeure significatif. Cela prouve  avec le nombre de communes que nous contrôlons aujourd’hui, que nous avons une base politique bien solide. Ce qui nous rassure qu’on aura plus qu’un groupe parlementaire dans les échéances à venir, notamment, les élections législatives. Et que nous sommes en train de nous préparer conséquemment pour aborder ces échéances prochaines.

Justinmorel.info : Est-ce que vous avez les sources financières nécessaires pour face à ces échéances ?

Abdoulaye Kourouma : Oui un parti qui a de nombreux militants et qui a beaucoup de cadres, ne compte que sur la cotisation de ces militants. J’ai confiance en mes militants, aux cadres et aux personnes de bonnes ressources du parti. Je crois que chacun de nous contribue de sa façon pour aider le parti. En ce qui concerne déjà les militants à la base,  c’est par  conviction qu’ils se retrouvent  dans cette formation politique.

Question de vous signifier que ce n’est pas un parti qui distribue de l’argent comme si le président en était un ancien premier ministre, c’est quelqu’un qui a des convictions pour la jeunesse, pour le pays. Et là,  les militants le savent. Les militants ne sont pas là pour de l’argent, ils sont là par conviction. La preuve est que le parti fonctionne  et il  a un siège. Nous avons des ressources humaines qui vont nous accompagner en matière de cotisation.

Justinmorel.info : Votre dernier mot… 

Abdoulaye Kourouma : Je lance un appel au gouvernement pour une fois de respecter la loi dans la sous-préfecture de Karala. Et partout dans le pays pour que la paix règne, afin que les guinéens vivent en cohésion. Et pour que vraiment la démocratie continue son chemin.  Lorsqu’il n’y a pas de justice, il n’y a pas de sécurité, il n’y a pas d’investissement!

Et, lorsque qu’il n’y a pas d’investissement il n’y a pas d’emploi et s’il n’y a pas d’emploi déjà, cela crée  de la haine entre les citoyens.  Le gouvernement a l’intérêt de respecter à la lettre nos lois et de sauvegarder  toutes nos lois  qui doivent demeurer nos valeurs absolues.

Interview réalisée par Léon KOLIE pour JMI 

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