Le Mali s’est réveillé mercredi matin sans président. Ibrahim Boubacar Keïta, dit “IBK”, a été contraint de démissionner dans la nuit, après avoir été arrêté plus tôt dans la journée avec son Premier ministre Boubou Cissé par des soldats mutins, rapporte le site d’information malien MaliJet.
Visiblement fatigué, muni d’un masque de protection chirurgical, Ibrahim Boubacar Keïta a expliqué vers minuit, dans une allocution télévisée, qu’il n’avait pas d’autre choix que de se soumettre à la volonté de son armée en révolte pour éviter que du sang ne soit versé. Le chef de l’État a aussi annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale.
“Les contempteurs du régime semblent avoir gagné, même si en fait c’est tout le Mali qui perd”, soulignait en début de soirée L’Observateur Paalga, après avoir appris l’arrestation du président malien. “Ibrahim Boubacar Keïta fait peut-être partie de l’histoire du Mali, mais les problèmes du pays, eux, restent entiers, particulièrement l’insécurité endémique dans laquelle il est plongé depuis bientôt une décennie. Et il faudra bien plus que la déchéance de son premier magistrat pour en venir à bout”, analyse-t-il.
“Un coup d’État au Mali pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour les pays voisins”
Ce putsch survient alors que le Mali et ses voisins sont confrontés depuis des années à des attaques djihadistes. Certains redoutent que le coup d’État de mardi ne vienne déstabiliser un peu plus la région. “On ne saurait remporter la guerre face aux terroristes, déterminés à vaincre, avec une armée qui semble vouloir ouvrir une nouvelle ère d’incertitude pour ce pays”, estime notamment le quotidien burkinabé Le Pays.
Inquiète pour la sécurité de la région, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a condamné mardi soir le renversement du président malien et de son Premier ministre par des “militaires putschistes”. Elle a aussi suspendu le Mali de tous ses organes de décision et décidé de fermer toutes les frontières terrestres et aériennes que partagent les pays membres de l’organisation avec Bamako. “Un coup d’État au Mali pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour les pays voisins, qui luttent déjà contre la porosité de leurs frontières”, note le Washington Post. “La fragilité du Sahel fait peur à tous les dirigeants de la région”, a expliqué au quotidien américain l’ancien haut fonctionnaire libérien Gyude Moore. “Si un pays tombe, cette instabilité peut se répandre à d’autres comme une maladie contagieuse.”
“Certains ne manqueront pas d’établir un parallèle entre les événements de mardi et ceux de 2012”, lorsque des militaires avaient renversé le président Amadou Toumani Touré, accusé d’incompétence face aux rebelles, analyse Will Ross, journaliste au service Afrique de la BBC. “Des djihadistes violents avaient alors profité du chaos pour s’emparer du nord du Mali. Et ils continuent aujourd’hui de semer le trouble à travers la région.”