Dans une interview exclusive accordée au reporter de justinmorel.info cette semaine, l’inspecteur d’Etat Alhassane Onipogui, ancien ministre du contrôle d’Etat économique à présidence de la République de Guinée, sous la période de la transition du Conseil National pour la Démocratie et le Développement (CNDD), s’est largement exprimé par rapport au gel des comptes des Établissements Publics à caractère Administratif (EPA) à la Banque Centrale de la Réputation de Guinée, entamé par le CNRD après sa prise de pouvoir le 5 septembre 2021.
A l’entame de ses propos, M. Onipogui a fait savoir que le gel des comptes des EPA (DAAF, ministères, Etablissements Publiques à caractère Administratif (EPA), épiques etc…), n’est pas suffisant parce que selon lui, ce gel est un gel des comptes internes. A son avis, c’est la BCRG qui gère à son niveau les comptes internes et les comptes externes. Elle est le plus grand gestionnaire de ces comptes-là parce qu’elle gère le crédit.
« On devrait plutôt commencer à arrêter les comptes de la BCRG pour éviter tous coulages puisque c’est elle qui est en amont, les autres sont en aval. Mais, même si par exemple vous arrêtez ou vous gelez les comptes des entités publiques, et vous laissez ouvert les comptes de la Banque centrale, notamment les comptes en devises ça, c’est un travail qui n’est pas suffisant. Il fallait commencer par faire la situation d’abord de la décomposition de la caisse de la banque centrale à la date du 5 septembre, voir combien de stocks d’ors, combien de devises etc… Il fallait décompter tout ça ensuite, comptabiliser puis laisser couler au lieu de se précipiter sur les comptes des entités publiques », explique-t-il.
Poursuivant, M. Alhassane a réagi en affirmant que geler les comptes des entités publiques est dangereux parce que selon lui, il y a les comptes sociaux, les comptes de la sécurité sociale qui par exemple, s’occupent du cas des malades.
« Aussi il y a les comptes humanitaires qui se regroupent dans le cadre des comptes sociaux qu’il ne faut pas geler, parce qu’ils participent à l’économie et à la demande interne. Donc en gelant ces comptes-là, vous étouffez tout le monde. Si vous voulez savoir à date qu’est-ce qui est dans les comptes des entités publiques, il faudrait envoyer tout simplement une mission d’inspection partout, avec pour rôle d’arrêter les comptes et avoir l’acte des caisses. Ensuite, vous savez déjà ce qui est disposé sur ces comptes-là et leurs décompositions. Et si vous voulez, vous prenez une décision en disant qu’à partir de maintenant il n’y a que les dépenses de personnels, les salaires qui sont payées d’abord sur vos comptes donc il n’y a aucun paiement. Là, le compte est intact. Pour ce, ils ne pourront pas faire de paiement là-dessus tant que vous n’autorisez pas. Mais vous bloquez tout le monde, vous gelez les comptes, je pense que ça c’est vraiment utopique », martèle-t-il.
Plus loin, notre interlocuteur, a fait comprendre qu’en général, quand un régime change, il faut faire l’audit de tous les comptes publics de l’ancien régime, pour ne pas que les comptes des nouveaux soient confondus avec ceux des partants.
« Pour ce faire, il faut tracer un trait rouge et ce trait rouge-là, c’est imaginaire mais ça peut être bien réel. En fait le trait rouge c’est quoi ? C’est qu’à partir de la prise du pouvoir, il y a des corps de contrôles dont l’inspection générale d’Etat, l’inspection générale des finances, la Cour des comptes qui ont le mandat de faire les audits. C’est-à-dire que vous devrez déployer ces corps de contrôle qui feront des contrôles ponctuels, ce n’est pas systématique, voir les contrôles des arrêts des caisses, ensuite les contrôles sur les dettes, (dettes intérieures, investissements etc…) donc, vous faites un contrôle général, c’est classique », soutien-t-il.
Alhassane Onipogui ajoute : « En 2009, quand le président Lansana Conté est mort, les militaires Moussa Dadis Camara et Sékouba Konaté qui, étaient notamment président au vice-président ont pris le pouvoir, j’étais inspecteur général des mines avant même que je ne sois ministre du contrôle d’Etat. A cette période, on a fait un arrêt de situations à date, on a fait l’arrêt de toutes les écritures au niveau de la BCRG, des entités publiques, et tous les autres établissements publics. En fait cela ne nuit pas à la bonne marche de l’économie. C’est-à-dire quand on gèle les comptes de ces entités, c’est comme si l’économie s’arrêtait de marcher. On n’a pas besoin de geler les comptes des EPA, il faut juste les contrôler au lieu de les geler. Donc on ne bouge pas, on laisse libre la Banque centrale qui est la principale gestionnaire. Si tu laisses la Banque centrale manipuler les devises, tu n’as aucune situation et jusqu’à présent, à date, il n’y a pas de situation de la banque centrale. Qu’attendent-ils pour faire la situation de la Banque centrale ? Ils doivent arrêter les écritures au niveau de la Banque centrale et voir ce qui s’est passé depuis le 5 septembre 2021. Mais ce qui est passé, est passé, on ne rattrapera plus ça », prévient-il.
Propos recueillis par Oumar KEITA pour JMI
JMI Copyright © JustinMorel.Info