En septembre dernier, notre site Web www.justinmorel.info, sollicitait une interview exclusive avec le légendaire attaquant guinéen, plusieurs fois lauréat des grandes joutes footballistiques africaines: Naby Laye Camara alias Papa Camara. Il accepta sans protocole et nous dit tout ce qu’il avait sur le coeur. Ce phénoménal don de la nature, cet illustre capitaine du Syli national, nous a raconté en toute simplicité sa vie, avec ce bonheur complice de partager avec nous, des tranches de vie, souvent jusque-là inconnues du grand public. Sa mort, le jeudi 4 janvier à 2h du matin, nous amène, dans la douleur, à vous livrer la dernière interview de celui qui fut un des plus grands capitaines du Syli National. Emouvant. Avec des images exclusives de JMI. Bonne lecture…
JustinMorel.Info :Presentez-vous en deux mots aux lecteurs de notre site Web.
Papa Camara : Alors, je dirais simplement: je suis Camara Naby Laye Moussa connu sous le nom » Papa Camara » , ancien sociétaire de l’équipe nationale de football et du Hafia Football Club de Guinée. C’est tout…
JMI : Depuis que vous n’êtes plus sur les terrains de foot, que faites-vous?
P.C. : Depuis que j’ai quitté les terrains, j’ai d’abord été entraîneur adjoint avec Mondlovian, qui était venu nous accompagner. Un moment je suis rentré dans les affaires, là, je vais mieux vous en parler pus tard. Actuellement je travaille au Port Autonome de Conakry.
JMI : Quels sont vos moments sportifs les plus marquants?
P.C. : Ce sera difficile de tout énumérer, mais ce qui est sûr et certain, sans nul doute, et que je n’oublierai jamais, c’est le triplé du Hafia Football Club; car en 1972 déjà nous, on était avec le Hafia. J’ai participé à la 1ère Coupe remportée par le Hafia, la 2ême jusqu’au triplé. J’étais capitaine et du Syli National et du Hafia Football Club. Rien que du bonheur.
JMI : Quels sont les sportifs et les sélectionneurs qui ont compté dans votre vie?
P.C. : Je vais commencer d’abord par les Guinéens. On a eu la chance de jouer avec Cherif Souleymane qui est l’unique « Ballon d’or guinéen »; ensuite les Maxime, Petit Sory et beaucoup d’autres… Condé Sekou qu’on appelait « le bondissant », les Jacob Bangoura, Soumah Soriba Edenté. Peut être que j’ai oublié certains mais c’est vraiment cette génération là. Nous avons commencé dans l’équipe nationale espoir avec Bernard Sylla, qui a d’ailleurs participé aux trois coupes remportées par le Hafia. Ensuite Aliou Keita « Jo Léa » qui n’est plus des nôtres et qui était « Monsieur But » de notre génération.. Il y a eu Bangaly Sylla également qui n’est plus des nôtres et plein d’autres, les Sydi Yaya Touré, Mory Koné qui est venu après se joindre à nous et un peu plus tard les jeunes Amara Touré et Mohamed Cheick Keita « Cocody ». Je pense à eux tous.
Quant aux joueurs étrangers je penserais d’abord au malien Salif Keita 1er Ballon d’̂Or Africain, les Roger Milla dans oublier cet autre Guinéen Kandia Diallo qu’on appelait « Mr. But ».
Pour les sélectionneurs, on a commencé d’abord dans l’équipe Espoir avec Chefoldy qui était un neveu à Budai, tous deux des Hongrois qui sont venus pour nous accompagner dans la formation de nos entraîneurs et, qui se sont occupé pendant plusieurs années de nos équipes.
En outre il y a eu Maître Naby un Guinéen qui est venu d’abord comme Directeur Technique et ensuite entraîneur. Il y a eu aussi Garrincha « Manè » qui n’est plus des nôtres.
JMI: Papa Camara avait eu une fois le Ballon d’argent, tout proche du Ballon d’or?
PC: Comme vous savez, il y avait une période où la CAF se réunissait pour désigner, à partir de critères précis, et par vote les trois meilleurs footballeurs africains de l’année qui sont les ballons d’or, d’argent et de bronze. Moi d’ailleurs, deux fois de suite, en 1976 et en 1977 j’ai été désigné comme meilleur second footballeur africain, donc avec le Ballon d’argent.
JMI: Vous avez été un homme d’affaires dans le monde sportif, cela continue-t-il?
PC: Effectivement avec la société « Papa Camara Sports ». C’est le président, feu Général Lansana Conté, paix à son âme qui m’a accompagnaé dans cette œuvre-la, qui m’avait beaucoup soutenu et je travaillais avec un Italien qui était installé à Paris, qui s’appelait Raymond Wick et qui s’occupait de la marque Santopola de Oro, une marque italienne pour les équipements sportifs. Mais j’ai un moment cédé cette affaire à ma fille qui est actuellement à Montréal, qui a aussi finalement négocié avec Sow Boutique, qui gère actuellement la structure.
JMI: Selon vos admirateurs vous traversez des moments difficiles, est-ce vraiment le cas?
PC: Bon, vous le savez c’est normal, pour tout humain d’avoir des hauts et des bas; il y a les maladies et bien d’autres choses. Mais, étant un bon croyant, je n’ai jamais voulu exposer mes problèmes sur la place publique. Pour moi tout ce qui arrive est de la volonté divine et ainsi va la vie.
JMI: Avez vous été approché pour être sélectionneur d’une équipe guinéenne?
PC: J’ai justement été entraîneur adjoint des entraîneurs étrangers, au niveau de l’équipe nationale.
JMI: Comment actuellement vous occupez vos journées?
PC: Là, vous m’avez trouvé à mon lieu de service. Je suis actuellement au Port Autonome de Conakry, je m’occupe des affaires sociales, donc je suis là.
JMI: Que dire de votre vie de famille, vos enfants, votre épouse?
PC: Normal, mon épouse depuis 1974, nous sommes ensemble et aujourd’hui nous continuons encore, et tout se passe bien sans probleme, Dieu merci. Je l’ai connue, elle était très jeune. J’ai eu deux enfants, une fille et un garçon; aussi deux petits enfants, donc grand père du côté de mon fils qui est malheureusement décédé. Ma femme est adorable, malgré tous mes défauts, elle m’accepte.
JMI: Quelle analyse faites vous du football guinéen?
PC: Tout d’abord, je m’en vais féliciter Antonio Souaré, pour tout tout ce qu’il est entrain de faire aujourd’hui, pour la manière avec laquelle il s’investit personnellement, pour redonner à notre football son lustre d’avant, pour que notre pays redevienne ce qu’il a été par le passé, dans ce domaine.
JMI: Êtes vous associé aux préparatifs de la CAN 2023 en Guinée?
PC: Je dirais que non pour le moment. Mais comme je le disais plutôt, avec le nouveau président de la Feguifoot, je ne peux pas me déterminer pour le moment sur la question, dire exactement ce qui va être.
JMI: Quels sont vos rapports avec la feguifoot, Fédération Guinéenne de Football?
PC: Pas de mauvais rapports avec la Feguifoot actuelle comme l’ancienne. D’ailleurs j’ai eu et j’ai encore beaucoup d’amis au sein des deux différentes Feguifoot et çà continue bien. Je ne peux que m’en féliciter.
JMI: Comment comptez vous vous investir personnellement au développement du sport et particulièrement du football guinéen?
PC: Pour cela ce ne sera pas compliqué, je ne vais pas être directement sur le terrain pour jouer par exemple; mais comme conseiller par exemple, je peux emporter ma petite contribution à l’émergence du football guinéen et pour davantage accompagner nos différentes formations nationales.
JMI: Autant on vous fera appel, autant vous serez disponible pour votre pays comme vous l’aviez fait pour le Hafia Football Club?
PC: Bien sûr, car ce serait un devoir patriotique que de l’accepter. Et d’ailleurs qu’actuellement, nous avons sur le terrain, des mécènes qui se battent pour le renouveau du football guinéen, notre sport que nous aimons tous bien et ça facilite la tâche.
JMI: Quel était le secret de la réussite du Hafia? Même si perdiez à l’extérieur, le public était sûr qu’à Conakry, la victoire était assurée. Nous avons en mémoire ce match, perdu 3 à 0 contre l’ASEC en Côte d’Ivoire et Hafia qui gagne 5 à 0 à Conakry?
PC: Pas de secret spécial. D’abord:
1. Nous avions la chance d’avoir de bons joueurs
2. Nous étions disciplinés au sein de l’équipe
3. Il y avait une entente parfaite entre les joueurs, on avait même créé un comité qui était chargé de gérer les différents problèmes des joueurs même les cas sociaux.
4. La discipline révolutionnaire aussi aidant, on ne voyait que la patrie qu’il fallait défendre. Tous on aimait notre pays et on avait l’esprit patriotique. En plus on ne jouait pas pour de l’argent mais pour la patrie.
5. Sur le terrain nous étions déterminés pour la victoire surtout avec l’aide d’un public qui était exceptionnel.
Je vous disais pas de secret spécial pour Hafia mais voici donc quelques uns, que je viens de vous citer.
JMI: Quels conseils vous donnez aux supporters?
PC: Je demanderais au public de venir toujours supporter nos différentes équipes qui évoluent surtout chez nous, et de ne jamais se décourager, car les jeunes en ont besoin, çà peut les galvaniser les motiver; nous par exemple avec le Hafia, quand on regardait le stade rempli à craquer, on ne voyait plus que la victoire, car on comprenait qu’on était pas là pour faire du n’importe quoi. Ça nécessite assez de sacrifices, mais quand on joue à domicile on doit gagner.JMI: Papa Camara pratiquait-il d’autres sports aussi?
PC: Oui, j’étais aussi dans le sport de mains tel que le basket-ball, le volleyball et le tennis de table. Mais mon beau frère Top Sékou qui fut ambassadeur en Allemagne m’ayant vu jouer au football, m’a dit: » Papa, c’est là que tu dois rester! Il faut rester dans le foot, je suis sur que tu y feras carrière ». Et c’est à partir de là que j’ai opté pour le football.
JMI: Et pour conclure, Papa Camara…
PC: Tout d’abord merci à votre site, JustinMorel.Info, car dès que vous avez dit « Justin Morel Junior’, le passé m’est revenu car que je connais Justin Morel depuis très très longtemps. Nous étions jeunes, il jouait aussi au foot, avec nous à la cathédrale. On était jeunes, avant même qu’on ne soit chacun à un certain niveau, moi dans le domaine du sport et lui dans le domaine du journalisme. Il est un Monsieur bien, surtout très effacé, et la dernière fois que je l’ai vu, c’était à Kouléwondy, il était venu assister dans une famille chrétienne au mariage de la fille d’un de nos tontons.
Mon tout dernier mot sera qu’on continue toujours à prier pour une bonne relance du sport guinéen, surtout le football et pour cela, j’ai de l’espoir et merci à votre site.
Aussi, je souhaite que nous oeuvrions tous pour la paix dans notre beau pays. Et pour vraiment conclure, merci à mon épouse pour tout. Merci à toi aussi, Tabassy Baro, que j’ai connu comme l’un des plus grands DJ, animateurs des bons vieux temps à Conakry, avec les Mathias. Non, je n’ai pas oublié. Merci, vraiment MERCI .
JMI: C’est nous qui vous remercions.
Propos recueillis exclusivement pour JMI par Tabassy BARO
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