Calissa Ikama, la plus jeune écrivaine du Congo est décédée le 11 novembre 2007, à l’âge de 15 ans, d’un cancer. 10 ans après sa disparition, la radio citoyenne des jeunes, avec pour fréquence 98.6 MHZ, a fait une évocation des moments caractéristiques de sa vie.
« In memoriam Calissa Ikama », est bien la tribune que ce média a consacré à Calissa Ikama. Une émission spéciale dédiée à Calissa Ikama, la première plus jeune écrivaine du Congo, dont la présentation a été assurée par Gloire Bakoula avec comme invités, le Dr. Noel Ramata Nkodia, écrivain, Grace Déborah Missetété, écrivaine en Herbe et Jean-Jacques Makaya, Secrétaire Général de la Fondation Calissa Ikama.
« Cette main, ce précieux stylo », « L’œil adulte du cœur d’une adolescente », « Immense fut son génie, tout le monde y souscrit », « Colombe littérature, partie trop tôt », des productions littéraires qui renseignent sur le talent et génie artistiques de Calissa Ikama.
Mot à mot, choisis soigneusement, tirés du plus profond de l’imagination des plumes issues des quatre coins du globe, le nombre de vers écrits pour exprimer la très grande admiration suscitée par les prouesses de la toute première plus jeune écrivaine du Congo se comptent par centaines.
Mise sous les projecteurs après la publication de son premier roman, le triomphe de Magalie, Calissa Ikama avait une imagination débordante.
Observatrice hors pair, amatrice des télé-novelas, Calissa Ikama, c’était aussi une guerrière qui a lutté courageusement, contre un type de Cancer très rare chez un enfant et qui, on peut l’affirmer sans se tromper, est morte, le 11 novembre 2007, armes à la main.
10 ans après sa disparition, que pouvons-nous apprendre sur Calissa Ikama à travers ses œuvres et ses déclarations ? Que penser de sa lutte courageuse contre le cancer ? Quel modèle est-elle pour les jeunes d’aujourd’hui ? Méditation sur ces interrogations, en cette date anniversaire, de sa mort. Et tout une émission sur la Radio Citoyenne des Jeunes, y apporte des esquisses de réponses.
« In memoriam Calissa Ikama », une émission spéciale enregistrée à l’occasion du 10ème anniversaire du décès de la toute première plus jeune écrivaine du Congo.
Trois invités ont répondu aux questions de l’animatrice principale de l’émission, à savoir : Noel Ramata Nkodia, Docteur en littérature française à l’Université de Paris IV-La Sorbonne, écrivain, critique littéraire, essayiste, romancier, poète, grand admirateur de Calissa Ikama et auteur du premier Dictionnaire des œuvres littéraires congolaises.
Pour marquer l’an 10 de la disparition de Calissa Ikama, ce premier invité a actualisé et fait publier, dans Afrique Education, un article publié en 2007 par Calissa Ikama.
La deuxième invitée, Grâce Déborah Missetété, la vingtaine révolue, écrit depuis l’âge de 11 ans. C’est en mars 2008, lors du 9ème Festival de Théâtre scolaire qu’elle a découverte Calissa Ikama, une découverte à l’origine de sa passion pour l’écriture, depuis 9 ans maintenant.
Grâce Déborah Missetété reste encore une écrivaine en herbe parce que ses écrits n’ont pas encore été publiés, mais cela ne l’empêche pas d’être très active sur les réseaux sociaux. En l’espace de six mois elle vient de multiplier le nombre d’abonnés à sa page « L’écrivaine désespérée » par 100 et l’une de ses publications a même dépassé les 25.000 vues…. Sur sa page « l’écrivaine désespérée » elle parle de « sa rencontre » avec Calissa Ikama en 2008, comme si elle était toujours vivante, alors qu’en ce moment-là, 4 mois s’étaient déjà écoulés depuis sa disparition !
Troisième invité, monsieur Jean-Jacques Makaya, qui est le secrétaire Général de la Fondation Calissa Ikama,
Au cours de cette émission est intervenue en ligne le Docteur Alda Stevie Makouanzi, Cancérologue Pédiatre de l’Hôpital Adolphe Sicé de Pointe-Noire.
Plus de 45 minutes, les différents intervenants dans cette émission ont fait immersion dans les profondeurs des idées de Calissa Ikama, à travers les moments caractéristiques, tels Calissa la guerrière, Calissa l’écrivaine, et Citations de Calissa.
En plus d’extraits d’interviews accordées par Calissa Ikama de son vivant les auditeurs de cette émission écoutéront aussi une partie de l’interview accordée par le Ministre d’Etat Henri Djombo, en sa qualité de président de l’Union Nationale des Artistes et Ecrivains du Congo.
Calissa, la guerrière
Au cours de cet instant de questions-réponses entre animatrice et invités, il s’est agi d’une réminiscence des derniers moments de la vie de Calissa IKama, sur cette terre des hommes. En effet, en novembre 2007, Calissa fait une rechute et est, à nouveau évacuée, elle quitte le Congo le 9 et arrive en France le 10. On imagine un peu dans quel état elle devrait être, quand elle est à nouveau admise à l’Hôpital de l’Institut Curie le 10 novembre au matin. Pourtant, le 11, à 4 heures du matin, Calissa Ikama se réveille et pendant une heure et demie, se met à peindre un tableau, « avec beaucoup d’humour et d’entrain ». Juste après, elle ferme les yeux pour ne plus jamais se réveiller. Moment évocatif, surtout émotif, qui a permis au Docteur Noel Ramata de déduire que Calissa Ikama est morte, comme au combat, arme à la main.
Jean Jacques Makaya, pour sa part, s’est appesanti sur l’explication ce dernier tableau, peint par Calissa Ikama, que l’on peut considérer comme étant le testament de Calissa. Cette fresque artistique représente une route toute blanche, comme si elle était couverte de neiges. De part et d’autre de la route, il y’a des arbres plantés, quatre du côté droit et le reste du côté gauche. Le premier arbre en allant dans le sens contraire des aiguilles d’une montre, est de couleur rouge sang. Les autres arbres sont tout blancs et semblent commencer à retrouver leurs feuilles vertes, ce qui évoque un changement de saison imminent.
A l’évidence, à travers ce tableau, Calissa adresse un message à sa patrie le Congo et à sa famille. Puisque les arbres imagés sur ce tableau sont au nombre de sept et Calissa Ikama est issue d’une famille de sept enfants.
Jean-Jacques Makaya, pour l’avoir vécue comme une nièce, a soutenu que Calissa l’écrivaine, s’est battue contre sa maladie sans perdre ses plumes. Dans l’une de ses dernières interviews, elle parle même d’un livre qu’elle a écrit sur son combat contre le cancer, 10 ans après, ce livre n’a toujours pas été édité. Et, au nom de la fondation Calissa Ikama, Jean Jacques Makaya a pris l’engagement de faire publier ce livre au cours du premier semestre de 2018.
Par ailleurs, l’un des vœux de Calissa, qui correspond aussi avec son désir de lutter contre les maladies incurables, c’est que l’on trouve un vaccin contre ce qu’elle qualifie de « satanée Maladie », ce qui suppose des gros investissements dans la recherche. Actuellement la Fondation Calissa Ikama agit plus dans le curatif et le préventif. J.J Makaya a émis le vœu de la mobilisation de la communauté nationale et internationale autour de la recherche sur la maladie du cancer sur toutes ses formes, afin d’aboutir à un vaccin contre cette pathologie.
Calissa, l’écrivaine
D’emblée les intervenants ont eu droit à deux extraits de la vie de Calissa: le film de lecture « Le triomphe de Magalie » et « une partie de l’interview de Calissa Ikama » ou elle parle de son deuxième roman « Le revers nous épie »
Les réactions des invités à cette émission ont parlé de Calissa, l’écrivaine comme une perle rare. En ce qu’il a fallu à Calissa Ikama, 14 mois pour écrire, 2 romans entiers, 80 pages manuscrites d’un troisième roman, et plus d’une quarantaine de titres. Tous ont répondu à la question de savoir, comment un enfant encore au début de l’adolescence peut-elle réaliser une telle prouesse en si peu de temps, sans déroger à ses autres habitudes, c’est-à-dire, aller à l’école, jouer, regarder la télé, et surtout rester une enfant ?
Bien plus, un regard attentif sur les œuvres inédites de Calissa Ikama, fait ressortir un sens profond de l’organisation du travail. Elle commencait toujours par décrire les personnages et dresser un plan sommaire ; un modèle d’organisation, qui peut servir aux jeunes entrepreneurs.
Grace Déborah Missetété, quant à elle s’est ressouvenue d’une des pensées de Calissa Ikama : « C’est en regardant les séries des films latino-américains que je m’inspire (…) je vois plusieurs films, et j’essaie de combiner les histoires. » Visiblement, elle aimait bien les Télé-Novelas et surtout elle savait en tirer le meilleur, c’est-à-dire la qualité des scenarios.
Noel Ramata Nkodia, à son tour, a abordé l’article-hommage à Calissa Ikama, publié dans le Magazine Afrique Education de novembre. Aussi peut-on lire dans cet article : « Et à nous de préserver le Triomphe de Magalie et pourquoi pas le mettre au programme dans les cycles secondaire des collèges ou lycées. » Par ces mots il émet le vœu de voir le premier roman de Calissa Ikama figurer parmi les œuvres au programme du cycle secondaire. Autant dire que « Le triomphe de Magalie » est d’une qualité littéraire qui n’a rien à envier aux œuvres étudiées actuellement dans les écoles, notamment les « Chroniques Congolaises » de Jean Baptiste Taty Loutard, « L’étranger » d’Albert Camus, « Le Pleurer Rire » d’Henri Lopes, et « Le Mariage de figaro » de Beaumarchais et bien d’autres.
Ainsi des actions des plaidoyers se mènent auprès des pouvoirs publics par Fondation Calissa Ikama, pour que cet ouvrage soit inscrit dans les programmes scolaires du Congo, surtout au secondaire.
Les Citations de Calissa
Dans cette partie, animatrice et invités se sont focalisés sur l’une des célèbres citations de Calissa Ikama, dans une interview sur Africa N°1, en 2005 : « J’ai des ambitions, des rêves, et des choses incroyables à réaliser, mais il faut d’abord que je prépare cette route. »
Ils ont, en outre, eu recours à d’autres de ses citations, à savoir « la mort est une étape de la vie, on devrait plutôt se préparer à l’accueillir et à l’accepter, je ne sais pas comment nommer cette vie on dirait que le mal nous observe attentivement, prêt à attaquer lors de nos moments agréables ou de joie, la vie à deux n’est pas toujours facile, c’est plutôt dur, car souvent les couples ne se font pas confiance mutuellement et enfin, j’écris, j’écris comme ça, je ne sais pas comment les idées arrivent j’écris juste. » Calissa Ikama a entre 13 et 14 ans quand elle a écrit ces mots. A la lumière de ces écrits le Ministre Henri Djombo admet qu’au regard de la pertinence de cette citation, il est facile d’être dérouté et de penser que l’auteur est un adulte. A son avis, il faut beaucoup d’attention pour arriver à la conclusion qu’il s’agit d’un jeune, et même là c’est difficile de penser à une enfant aux débuts de la puberté.
Il faut conclure
Calassi Ikama, perle littéraire, qui était en avance sur le temps est née le 8 juillet 1992. Cette adolescente, aura passé un bref sejour sur cette terre des hommes. Mais elle aura et continue a marqué ses contemporains et ceux des siècles à venir sur la dimension de son génie. On peut, toutefois retenir qu’en 2006, lorsque Calissa Ikama découvre qu’elle est atteinte d’un cancer, elle devient introvertie et s’enferme dans un mutisme qui montre qu’elle a du mal à accepter ce qui lui arrive. Il a fallu du temps et un changement d’hôpital pour qu’elle retrouve enfin ses esprits.
Si en février 2007, Calissa écrivait dans son journal intime « J’ai eu cette maladie sûrement parce que je gardais toutes les mauvaises choses que j’ai subi et certaines questions en tête… », C’est dire Calissa Ikama avait saisi la force du destin sur sa vie. Elle a vécu 15 ans, une courte vie, jalonnée d’une œuvre monumentale. A la vérité, les « génies ne vivent pas longtemps. »