Aboubacar Soumah, député uninominal de la commune de Dixinn et ancien allié du chef de file de l’opposition et leader de l’UFDG, a accordé cette semaine une interview exclusive à notre rédaction dans laquelle, il s’est largement expliqué sur sa nouvelle formation politique, (Parti Démocratique pour l’Equilibre ), la promulgation du nouveau code électoral, la question ethnique et tant d’autres sujets brûlants de la cité ont été abordés.
Justinmorel.info : Quel est aujourd’hui l’état de santé de votre formation politique, le PDE sur l’ensemble du territoire national ?
Aboubacar Soumah : L’état de santé de mon parti est très bon. Vous nous avez trouvés en train de tirer les petites leçons de notre action, nous préparons l’assemblée générale de demain. J’avoue que les choses vont très bien lentement, mais sûrement. Sur l’ensemble du territoire national, nous avons installé presque dans des localités de Conakry et de la Basse Guinée, toutes nos structures. Je vous rassure que nous irons vers la Haute Guinée, la Moyenne Guinée et la Guinée Forestière.
Justinmorel.info : Quelle est votre lecture sur la promulgation du code électoral par le président de la République ?
Aboubacar Soumah : Vous savez que ce code électoral dans son article 82 alinéa 2, a été décrié par l’ensemble des patriotes guinéens, parce que c’est une violation flagrante d’une disposition de la Constitution qui interdisait aux partis politiques de s’impliquer dans la vie publique des quartiers. Nous avons voulu que les conseils de quartiers soient plus ou moins neutres. Malheureusement, ce compromis entre deux groupes ethno-politiques a amené à faire cette compromission de la nation.
Je vous avoue que cela va créer pas mal de problèmes. Parce que personne n’acceptera, vu la situation ethnique aujourd’hui du pays. Si tu prends l’UFDG, il faut appeler le chien par son nom, est composé à 99 pour cent de l’ethnie peule de même que le RPG qui est également composé de l’ethnie Malinké.
Le PUP d’alors était presque la même chose. A la seule différence, quand le PUP était au pouvoir tandis que le parti se créait, ainsi, certains fils du pays notamment de la Haute Guinée, la Moyenne Guinée et la Guinée Forestière ont profité de ce parti. Par conséquent, si les deux partis RPG et l’UFDG tous, majoritairement politiques veulent se partager le pays et l’exemple est la recomposition des délégations spéciales du pays. Après la part du lion du RPG-arc en ciel, c’est l’UFDG, partout en Basse Guinée, vous constaterez ce qu’ils ont mis comme délégation spéciale, ainsi que dans les autres régions du pays. Comment on peut accepter que les personnes qui ne connaissent même pas votre langue, vos coutumes s’installent à la tête de votre commune pour vous diriger. Voter une loi est une chose, la promulguer est une autre chose. Mais l’appliquer, un autre problème. Moi je pense qu’il ne sert à rien de voter une loi, la promulguer sans l’appliquer. Ce code électoral va créer des situations indésirables au pays.
Justinmorel.info : Dites-nous quel est votre regard sur la marche pacifique de l’opposition républicaine le 2 août dernier ?
Aboubacar Soumah : Pendant cette marche, il y avait des petits enfants qui n’ont même pas 14 ans. Honnêtement, il y avait une mobilisation, mais si tu es Guinéen et tu regardes les gens qui se sont mobilisés, tu sauras que c’est une ethnie qui est sortie. Ce sont les peulhs. C’est clair. Sur dix personnes qui passaient, neuf sont des peuls. Pourquoi les Guinéens ont peur de dire ce qui est touchable. Si ça continue comme ça, c’est très dangereux pour ce pays. De Kagbelent à Dixxin, toutes les autres ethnies étaient tranquilles, seulement les curieux venaient jeter les regards. Ceux qui marchaient à pieds, ceux qui étaient sur les motos ou dans les voitures, à 99 pour cent, ce sont des peuls ! C’est la vérité. On ne peut pas diriger un pays dans ce cadre. Il faut qu’on ait le courage de se dire la vérité. Je suis soussou, mais je ne peux pas créer un parti pour les soussous et conquérir le pouvoir pour les soussous et avec les soussous. Je suis d’accord quand les gens disent que tous les postes de responsabilité ont été ethnisés. Parce que ceux qui ont conquis ce pouvoir l’ont fait sur la base ethnique. Il faut qu’on identifie le mal pour trouver la solution nécessaire. Le président Sékou Touré était malinké, mais certains malinkés n’ont connu la souffrance qu’en son temps. Certains même ont connu l’exil. De même que Lansana Conté qui était soussou. C’est quand il est venu au pouvoir que certains soussous ont perdu leurs postes et basculé dans la pauvreté. Cherchons quelqu’un qui jugera le Guinéen en tant que Guinéen sans tomber dans cette affaire d’ethnie. Sans chercher à savoir si tel est Barry, Sovogui, Soumah ou Condé. Si l’UFDG dans sa phase actuelle accède au pouvoir, elle sera pire que ce qui s’est passé. C’est pourquoi, il faut une nouvelle classe politique. Les deux plus grandes classes politiques sont vieillissantes depuis les indépendances. Il faut que la génération actuelle que nous sommes prenne ses responsabilités.
Justinmorel.info : Certains vous traitent ‘’d’ingrats ‘’ parce que vous avez été député, grâce à l’UFDG, que vous avez abandonné aujourd’hui…
Aboubacar Soumah : Ceux qui le disent ne me connaissent pas. Quand je suis venu à l’UFDG, j’étais le maire élu du PUP (Parti de l’Unité et du Progrès). En 2010, j’ai accepté d’accompagner le candidat Cellou Dalein Diallo, je me suis battu de façon visible sur le terrain. Pour une simple raison parce qu’on ne connaissait pas Alpha Condé. Nous nous sommes dit, on préfère soutenir celui qui a travaillé dans notre équipe gouvernementale du PUP pendant 10 ans, jusqu’à devenir premier ministre. A l’époque, tous les 4 maires de Conakry ont soutenu le candidat Cellou Dalein Diallo. Seule Hadja Nènè qui n’a pas soutenu à l’époque Cellou Dalein, et a préféré Alpha Condé pour des raisons de proximité. Et, vous savez après l’élection d’Alpha Condé, nous avons été révoqués de nos fonctions par décret. Si je vous dis que l’UFDG n’a rien fait pour moi j’aurais menti. Mais, quand j’ai compris que la ligne politique pour laquelle, je suis parti à l’UFDG n’est pas appliquée, j’ai pris mes responsabilités en créant le PDE qui est ma propre formation politique. Je ne peux pas rester dans cette formation politique de façon démagogique. C’est pourquoi je l’ai quitté. Moi, j’ai sacrifié mon poste à cause de l’UFDG. Maintenant entre nous qui est ingrat. J’entends les gens dire, c’est moi qui est réalisé telle route, tel pont ou quoi. Tombo-Moussougou, le pont de Kaloum etc. Mais, ce n’est pas vrai. Un ministre n’a pas de projet de société. Un ministre exécute le programme d’un gouvernement. Un ministre est nommé sur les instructions d’un parti politique au pouvoir qui exécute son projet de société. Mais un ministre ne doit pas s’approprier de ce travail. Ils ne savent même pas quand est-ce Lansana Conté a décidé de débarrasser les fleuves guinéens des barques. Le jour où Lansana Conté disait cela, on ne connaissait même pas Cellou Dalein. Aujourd’hui, il s’approprie de tous les bienfaits de Lansana Conté. C’est ingrat. Dans un régime, tu prends le côté positif et ce qui est mauvais, tu rejettes sur le président Conté. Ce n’est pas quelqu’un qui a réalisé l’autoroute, c’est un régime qui l’a fait, pas un ministre!
A l’allure où vont les choses, si l’UFDG vient au pouvoir, si tu ne penses pas comme eux, vous verrez la dictature la plus sanglante que l’humanité n’a jamais connue. Tout le monde sait que quand Cellou Dalein était dans le gouvernement, c’est lui qui finançait les partis de l’opposition, on le savait. Tout le monde sait qu’il est du PRP. Et, tout le monde sait comment l’UFDG a été fondée. C’est sur la base ethnique, de même que le PUP ou le RPG. Il faut qu’on ait le courage de s’attaquer aux maux de ce pays.
Interview réalisée par Léon KOLIE pour JMI
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