Le 9 juin 2007, le cinéaste Sembène Ousmane nous quittait des suites de maladie à Dakar. Homme de culture, le défunt est décédé sans pouvoir parachever son projet de film sur le résistant guinéen l’Almamy Samory Touré de Guinée.

Originaire d’un village de Casamance, Sembene Ousmane fait partie des tirailleurs sénégalais mobilisés par l’armée coloniale française pendant la Seconde Guerre Mondiale. Arrivé clandestinement à Marseille en 1946, il y travaille comme maçon, puis docker. C’est à cette époque que le jeune homme engagé-il milite à la CGT- découvre le cinéma et la littérature. Devenu écrivain, il relate son expérience d’immigré dans Le Docker noir, son premier roman, publié en 1956.

Désireux de se faire entendre par le plus grand nombre, Ousmane Sembene, bientôt quadragénaire, choisit de s’exprimer à travers le cinéma. Après avoir consulté André Bazin et Georges Sadoul, il part étudier le 7e art à Moscou. En 1963, il signe son premier court métrage, Borom Sarret, qui décrit le quotidien d’un charretier à Dakar. Il passe au long trois ans plus tard avec La Noire de…, l’histoire d’une domestique noire maltraitée par ses patrons blancs. Couronné par le Prix Jean-Vigo, ce film est le tout premier long métrage produit et réalisé en Afrique noire.

S’il dépeint avec humour et sans concessions les rapports sociaux dans l’Afrique contemporaine (Le Mandat, 1968), Sembène Ousmane s’attache aussi à évoquer les pages les plus sombres de l’histoire de son continent : les conflits religieux au XVIIe siècle (Ceddo, 1977), ou les affrontements avec l’armée coloniale durant la guerre : Dieu du tonnerre en 1971, puis Le Camp de Thiaroye, Grand Prix du Jury à Venise en 1988, une œuvre qui revient sur le massacre des tirailleurs sénégalais par des gradés français en 1945. Après Guelwaar (1991), Sembène, homme de combats, entame une trilogie baptisée « L’Héroïsme au quotidien », portant notamment sur la condition des femmes en Afrique : il fait le portrait d’une mère célibataire dans Faat Kiné, le premier volet (2001), tandis que Moolaadé -l’un des films les plus remarqués au Festival de Cannes 2004- est une dénonciation de l’excision.

Écrivain et cinéaste africain, Ousmane Sembène demeure une figure de proue dans le champ de la création aussi bien littéraire que cinématographique. Il aura amplement marqué son temps, en laissant à la postérité une œuvre impérissable.

Thierno Saïdou DIAKITE

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