Le 5 mai 1996, stupeur et consternation en Guinée. Aly Badara Diakité, le fulgurant journaliste animateur s’est tu à jamais. Hospitalisé le 12  mars 1996 au CHU Ignace Deen, il y rendit l’âme le 4 mai 1996. Retour sur la vie de celui qui apporta une révolution au style d’animation radio.

Dimanche 5 mai 1996. Par la voix de Sékou Mady Traoré (décédé le 6 octobre 2013), qui présente le journal parlé de 9h, la terrible nouvelle nous parvient en ces termes: ‘’…Tout ce qui est debout se couchera, Tout ce qui brille s’éteindra, Tout ce qui bat s’arrêtera! La mort est dans la vie. La vie est dans la mort ».

ABD était avec nous. Et depuis ce 4 mai 1996, ABD entre dans l’histoire par la porte des grands, dont il savait aussi honorer la mémoire. Que d’émotion ! Que de tristesse sur l’homme ABD tout court, qui par son acharnement au travail a pu sculpter dans le marbre ses dimensions pour la postérité…’’

Né en Côte d’Ivoire le 2 janvier 1954 à Adjamé, Aly Badara Diakité suit sa formation scolaire et universitaire entre ce pays et la Guinée. Professeur de français et d’histoire à Abidjan, il sera par la suite correspondant de la RTI à Bouaké. Souvent invité par le journaliste vedette de la RTI, Roger Fulgence Kouassi, il sera beaucoup influencé par ce dernier.

De retour en Guinée en 1984, il intègre la radio nationale par l’entremise de Justin MOREL Junior, à l’époque directeur général de la RTG, qui le testera et le lancera. Son baptême du feu se fait avec les émissions  »Contact Culture », diffusées mardi à 14h, et l’émission Podium qui passait  dimanche à 19h. L’émission phare qui consacra son succès fut incontestablement l’émission AFRICA DANSE du samedi à 9h.

Entouré des techniciens Mamady Nabé ‘’l’enfant de Bancö’’ et Mohamed Sylla ‘’ le talentueux’’, ABD avait ravi la vedette à tous les animateurs culturels par son inspiration féconde et son style bien particulier d’animation à l’antenne.

Son ouverture d’esprit était impressionnante. En témoigne un extrait d’une de ses émissions : ‘’…On peut sans risque de se tromper affirmer que Marley a ouvert la voie aux Touré Kunda, Alpha Blondy, qui avec leur reggae basique ont ainsi pu franchir les portes du succès. Portes qu’ils ont laissé béantes à d’autres artistes dont la musique s’avérait graduellement plus complexe pour arriver au rythme de Salif Keïta sur Soro et Youssou N’Dour et son Balax. Le tableau brossé peut sembler pessimiste surtout si l’on ajoute que Salif Keïta avec Soro a connu un véritable bide. De même Youssou N’Dour dont on murmure les remerciements de Virgin International faute de vente suffisante en Occident. Déprimant ! D’un côté, l’émergence d’artistes dans les gros labels avec une diffusion internationale mais les ventes peu gratifiante. De l’autre, les circuits de variétés plus spécifiquement étudiés pour répondre aux besoins du continent africain. Soukouss et assimilés sont très vendus mais dans un circuit bien établi et contrôlé sur les antennes des radios africaines mais pas occidentales…’’

Cette intervention dénote le fait que le défunt s’informait beaucoup sur l’évolution de la musique et des artistes. L’unique recette pour suivre l’actualité musicale. Son exemple devrait inspirer l’actuelle génération d’animateurs culturels. C’est le travail et la remise en cause permanente qui payent. Et rien d’autres. Sur un tout autre plan, ABD s’était investi dans la promotion avec l’agence Conakry Magakhoui, qu’il anima avec brio en compagnie de Fodéba Isto Keira et Alia Camara. Une structure qui fit le bonheur de nombreux artistes.

Décédé à l’âge de quarante-deux ans, l’homme qui ne disait jamais son nom les samedis, fut rappelé à dieu un samedi. Quelle triste coïncidence !

Photo. De g à d: Jeannot Williams et ABD

 Thierno Saïdou Diakité pour JMI

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