Aliou Bah, l’ex directeur de communication du Bloc Liberal de Faya Milimono et actuel président du nouveau parti en gestation, le Mouvement Démocratique Liberal (MoDel), a accordé cette semaine une interview exclusive à notre rédaction. Au cours cette rencontre, le jeune politicien s’est  amplement exprimé sur certaines actualités défrayant la chronique dans la cité notamment sur les objectifs de la création de son parti en gestation, les crises sévissant au Port autonome de Conakry  et à la Cour Constitutionnelle et plusieurs autres… 

Justinmorel.info : Vous venez de lancer  votre mouvement MoDel, qui est d’ailleurs un parti en gestation. Dites-nous, les raison valables qui vous ont poussé à créer cette formation politique ?    

Aliou Bah : Il y a eu un ensemble de constats qui ont été faits par des jeunes guinéens, c’est-à-dire,  la politique a servi à quoi en Guinée. Et, il se trouve que selon notre façon de voir les choses, la politique n’a d’importance que quand elle ne sert qu’à lutter contre la pauvreté, quand elle sert à réduire les inégalités, quand elle sert à garantir la paix sociale, à garantir la stabilité de nos institutions, bref à qualifier notre processus démocratique et à garantir la prospérité économique .

Mais, si on fait le bilan aujourd’hui, nous nous rendrons compte que la politique n’a fait que diviser les guinéens, la politique n’a fait que créer des crises et des crises chroniques de telle sorte qu’aujourd’hui, les jeunes de Guinée qui représentent la majorité de la population en terme de proportion, s’interrogent sur leur avenir.

L’avenir devient de plus en plus incertain au point où beaucoup de nos compatriotes deviennent désespérants pour choisir le chemin de l’exil. Nous pensons que la Guinée regorge un potentiel énorme pour ne pas que ces enfants errent dans la monde surtout qu’ils prennent le chemin du désert, du Sahara ou de la méditerranée.

Et nous sommes aujourd’hui l’un des plus grand pays demandeurs d’asile dans les pays occidentaux, ça ne nous honore pas et nous pensons que la Guinée a eu de la chance de ne pas vivre une guerre civile Dieu merci dans une sous-région  aussi instable.

Donc, nous avons des atouts. Là où cela n’a pas fonctionné, c’est le fait que le leadeurship en Guinée n’a pas été à la hauteur des attentes. La population,  elle est brave, mais elle a toujours été mal dirigée.

Alors, il est parti de ces constats pour se dire qu’il est important qu’on travaille à proposer une nouvelle voie. Même pas pour augmenter le nombre de partis politiques, il y en a pléthore dans notre pays, mais pour augmenter et améliorer la qualité de l’offre politique. Parce que notre souci n’est pas de faire le trop plein quantitatif, nous voulons faire le trop plein qualitatif en participant aux débats politiques nationaux de façon structurée et faire en sorte que nos propositions puissent répondre aux préoccupations majeures de nos compatriotes.

Voici ce qui a motivé des jeunes de Guinée qui vivent ici et au niveau de la diaspora à s’organiser autour d’un ensemble d’idées et de proposition pour travailler et mettre à jour le projet politique qu’on appelle aujourd’hui le mouvement démocratique libéral pour lequel j’ai la responsabilité de diriger, de conduire l’organe provisoire de direction en ma qualité de président.

Justinmorel.info : A cet effet, vous envisagez  de vous présenter aux deux élections majeures  qui se profilent à l’horizon notamment, les législatives en 2019 et présidentielle de 2020 ?    

Aliou Bah : Evidement la vocation qui cycle  tous partis politiques,  est de participer  à tous les processus électoral C’est à travers, l’élection qu’on peut mesurer la qualité de votre message, l’impact de votre message sur la population.

C’est l’élection qui sanctionne positivement et négativement les discours  et les projets politiques. Donc, nous entendons  participer à toutes les élections qui vont s’organiser dans le pays.

Et pour les législatives,  nous pensons qu’elles sont déterminantes dans la mesure où selon notre projection de la Guinée, c’est que l’année 2020 est une année charnière ça ne saura pas qu’une année électorale. C’est une année de recomposition du paysage politique. Qui dit recomposition, parle de distribution des cartes  politiques. Et pour ce faire, les élections législatives représentent une étape importante vers cet enjeu de reposition.

Deuxièmes, l’Assemblée nationale est importante dans une démocratie. C’est l’espace des débats idéals parce qu’elle est sensée de rassembler toutes sensibilités politiques du pays, toutes les tendances politiques, pour être cet espace de contradiction, mais une contradiction dans la constitution qui  pour permettre d’aller de l’avant pour gérer les problèmes du pays, légiférés les aspects importants pour contrôler l’action gouvernementale. Au-delà de ça, l’Assemblée nationale à un rôle aussi de contrepouvoir.

Nous pensons que avoir des élus à l’Assemblée nationale pour un jeune parti, ce serait très bien déjà dans la dynamique de la recomposition pour qu’on participe de façon à pouvoir poser des actes au niveau du débat politique national dans la structure la mieux indiquée qui est le parlement. Et pour finir, je serai bel et bien au rendez-vous concernant les législatives 

Justinmorel.info : Votre analyse sur cette crise qui perdure à la Cour constitutionnelle depuis un moment ?

Aliou Bah : Vous savez que  c’est une question qui était prévisible parce que ça ne date pas d’aujourd’hui, et il y eu un cas révélateur depuis que Kéléfa Sall a prononcé ce discours à l’occasion de l’investiture du président pour son deuxième et dernier mandat, nous savons pertinemment qu’il n’était pas dans les bonnes grâces du président et de tous ceux qui veulent assurer la promotion du troisième mandat.

Maintenant la Cour constitutionnelle dans son fonctionnement, il y a eu plusieurs tentatives. Je rappelle récemment que lors du renouvellement partiel, le président de la Cour constitutionnelle n’était même pas présent à la prestation de serment des trois conseillers qui ont rejoint tout dernièrement l’institution, dans le cadre du renouvellement partiel.

Et le président de la Cour constitutionnelle exerce un seul mandat qui est non renouvelable pour neuf ans. Nous savons que les enjeux de 2020 sont là et qu’il y avait bel été de promouvoir et de soutenir un troisième mandat en faveur d’Alpha Condé. Alors les conseillers ont donné des arguments comme quoi, il y a un manque de transparence dans la gestion des ressources allouées à l’institution, mais si tel était le cas des soupçons comme ça, qu’est-ce qui aurait été fait ? Quelle serait la démarche la mieux indiquée ?

C’est que les conseillers pouvaient adresser une correspondance à l’inspection générale d’Etat, ou bien à la Cour des comptes pour demander à ce que l’inspection vienne vérifier comment, est-ce que les ressource du budget de l’institution utilisées. C’est un rapport d’inspection d’Etat qui devrait être confirmé et rendu public pour que les guinéens soient informés de ce qui se passe au niveau de l’institution.

Deuxièment, la loi dit que pour destituer le président de la Cour constitutionnelle, il faut deux cas de figures. Soit qu’il ait violé flagramment son serment, soit qu’il ait commis un crime pour lequel il doit être condamné par les juridictions.

Je pense que nous ne sommes pas  en face à ces deux cas de figures. Alors quand on a une situation de ce type qui concerne le plafond de notre schéma juridictionnel, c’est assez inquiétant, parce que c’est l’ultime recours pour notre pays. Et ceux qui sont membres,  sont considérés comme des sages.

Traditionnellement, on les appelle comme ainsi. Mais,  si ce sont eux qui commettent une telle forfaiture, violant de façon flagrante des textes de loi, en s’érigeant en petit clan pour régler des comptes et dérouler un agenda politique encore une fois, ça fragilise nos institutions. Et, cela ne nous rassure pas que la Guinée est sur une bonne voie en tout cas en matière de démocratie, nous nous éloignons de plus en plus des principes de base.

Justinmorel.info : Malgré l’invite de l’inspecteur général du travail Alya Camara à la table de négociations concernant leur huit millions de salaire, Aboubacar Soumah et ses compagnons du SLECG refusent de lever leur mot d’ordre de grève.  Qu’en dites-vous ?   

Aliou Bah : Ecoutez, j’ai entendu des échos autour de ce problème aussi crucial, des annonces, je pense qu’ils avaient prévenu le gouvernement. Moi, je pense que ce  gouvernement n’est pas à la hauteur des attentes de nos compatriotes. Et, il  utilise tout le temps le mépris, ou utiliser des combines du genre à créer un syndicat parallèle pour chercher à faire le contre plan, tout ça,  ce ne sont pas des stratégies intelligentes,

il faut faire face aux problèmes et assumer ses responsabilités. Je pense que le cas du SLECG est révélateur de ce que nous avons eu regrettable dans ce pays. Soumah a été rendu populaire par la naïveté de ceux qui sont autour du président et par l’orgueil et l’arrogance du président lui-même et par la suite, il a réussi et vous avez vu comment, est-ce que les choses se sont passées.

Maintenant chercher à l’anéantir en manipulant les gens au niveau du secteur de l’enseignement et nommer des ministres, vous avez vu l’actuel ministre de l’éducation et son ancien, moi je connais un peu leur passé, le gouvernement  a décidé de tuer complètement l’éducation guinéenne, alors ça, c’est tuer l’avenir du pays parce que nous savons pertinemment que l’avenir du pays est basé sur la qualité du système éducatif.

Vous voyez comment ça se passe aujourd’hui, donc moi je crois que tout ça-là, ça nous conduit à constater des crises multidimensionnelles et encore une fois ce régime n’est pas à la hauteur par rapport aux attentes en matière de développement socioéconomique de la Guinée.

Justinmorel.info : Récemment, le ministre Bouréma Condé a annoncé lors d’une conférence de presse à son département qu’à partir du 0 octobre, les conseillers communaux issus des élections locales du 04 février dernier vont être installés…

Aliou Bah : En ce qui me concerne, j’en doute fort pour avoir vu ce qui s’est passé, c’est encore honteux, il y a eu des élections depuis février et qu’on ne soit pas capable d’installer les conseillers communaux. Si je vois un peu qu’au Libéria et en Sierra Léone, ce sont des pays qui sont capables d’organiser des élections nationales et locales le même jour, voter correctement le même jour, publier les résultats à date indiquée, installer les élus à date également indiquée et, travailler sans bruit pour qu’on ne soit pas dans un problème du genre fichier électoral, CENI et tout ça.

C’est encore des Libériens et Sierra-Léonais, des réfugiés que nous avons reçus dans notre pays pendant des années qui sont rentrés chez eux et qui sont en train de bâtir leur démocratie. Et chez nous, nous sommes jusqu’à présent incapables d’être à la hauteur de ce qui est réclamé qu’au minimum par les populations.

Encore une fois en Guinée franchement qu’on soit capable de s’indigner. Des choses comme ça, ça ne nous honore pas, nos dirigeants devraient avoir honte de la population, honte face à l’histoire pour ne pas continuer à justifier qu’on est mieux en retard par rapport à tel ou tel.

On a eu des élections en 2010 combien de mois que nous avions fait pour enfin en connaitre les résultats ? Nous y sommes habitués maintenant, le calendrier électoral en Guinée est constitutionnel, malheureusement, il n’est jamais respecté.

Il ne s’agit pas simplement de tenir des élections pour les tenir, mais les tenir à la date indiquée. A ce stade qu’est-ce qui nous garantit qu’on aura les législatives et les présidentielles à temps plein ? Tant qu’on continuera comme ainsi, nous ne sommes pas en train de bâtir une démocratie.

Justinmorel.info : Votre dernier mot                 

Aliou Bah : Ecoutez, moi j’ai la responsabilité de diriger aujourd’hui un parti politique en gestation, nous sommes en procédure, je le rappelle, en attendant d’obtenir l’agrément. Nous essayons d’expliquer à nos compatriotes l’identité de ce parti et qu’est-ce qu’il vise, nous entendons promouvoir un projet de société innovant qui va s’occuper des grandes questions liées à la vie de la nation et proposer des grandes solutions pour bâtir une nouvelle Guinée.

Nous portons une ambition collective pour la Guinée et nous interpelons toute la jeunesse et tous les Guinéens qui veulent souscrire à une nouvelle ligne, à une nouvelle offre politique de se joindre au MODEL parce qu’ici, nous avons une exclusivité par rapport à la façon de conduire. Dans les activités du parti, nous faisons appel à toutes les compétences, nous sommes un parti qui veut rassembler toutes les sensibilités de la Guinée pour bâtir une nouvelle vision et conduire la Guinée non seulement vers des reformes conjoncturelles nécessaires

Mais des reformes structurelles de fond pour qu’à l’avenir, la Guinée soit dotée d’un nouveau schéma institutionnel qui puisse garantir son développement économique et social. La Guinée doit être un pays prospère et dans lequel chacun de ses fils doit pouvoir s’épanouir et un pays dont tous les guinéens doivent être fiers.

Et pour cela, j’ai la mission et la responsabilité de conduire ce parti politique et j’invite tous mes compatriotes à s’intéresser à ce projet-là. Plus loin, je terminerais en disant particulièrement aux cadres, la Guinée est un pays qui a souffert le fait  que ses intellectuels ont refusé de faire de la politique, quand vous ne faites pas de la politique, vous serez toujours sanctionnés en étant gouverné.

C’est ce que nous sommes en train de vivre. Si ceux qui doivent faire de la politique, se mettent en marge forcement et nous savons que  la nature a horreur du vide. Donc ceux qui ne sont pas qualifiés pour être des bons décideurs, seront-là pour occuper cet espace-là. Et c’est très dangereux pour un pays, c’est ce que nous avons vécu depuis l’indépendance jusqu’à maintenant.

Les intellectuels guinéens doivent comprendre que la politique est une vocation et qu’ils doivent s’impliquer, parce que non seulement, ils ont les capacités intellectuelles, l’expérience nécessaire, la moralité et l’éthique qu’il faut, les aptitudes globalement  pour pouvoir être des bons décideurs de demain.

Et, c’est sur le terrain que cela se passe, il faut qu’ils soient en politique pour exercer leur rapport de force, afin de qualifier d’avantage pour le personnel politique de tous bords pour qu’on puisse avoir un débat contradictoire.

Interview réalisée par Léon KOLIE pour JMI

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