Francis Haba, vice-président du du parti Union Guinéenne pour la Démocratie et le Développement (UGDD), a accordé cette semaine  une interview exclusive à notre rédaction. Au cours de cette rencontre, notre interlocuteur s’est exprimé largement sur la situation socio-politique actuelle du pays, le compromis politique mettant fin au contentieux électoral issu des élections locales du 4 février dernier, la nouvelle loi sur la CENI  et tant d’autres sujets.     

Justinmorel.info : Votre avis sur la situation socio-politique du pays ?

Francis Haha : Notre pays, disons-le sans détour est malade, malade de beaucoup de maux. Socialement,  notre pays ne se porte pas bien. Vous avez vu récemment que  les Forces sociales étaient dans les rues pour réclamer la baisse, à juste titre, du prix des carburants que le gouvernement a unilatéralement augmenté. Notre pays est aussi malade de son économie parce que de plus en plus, il  y a des chômeurs malgré l’ouverture de nos mines, malgré l’ouverture de notre pays aux investisseurs étrangers. Mais aussi,  il y a beaucoup  plus de licenciements.

Il y a aussi la gouvernance qui est complètement malade, vous vous souvenez de la nomination de Kassory Fofana, qui a juré qu’il va lutter contre la corruption, il a commencé naturellement par l’OPG et puis l’Office Guinéenne des Chargeurs. Malheureusement, cela s’est arrêté là et récemment, on a été informé des accusations très graves portées contre sa personne, n’est-ce-pas, par les Forces sociales, qui ont déclaré que le premier ministre, Kassory Fofana  a tenté de déstabiliser leur mouvement,  en proposant à certains membres influents de la société civile, un montant de 40 millions de nos francs  à son domicile privé. Cela est extrêmement grave pour une personne qui vient de prendre fonctions à la primature et qui se livre à ces genres de corruption.

Et,  jusque-là, on n’a pas entendu un avis ou, en tout cas, un communiqué du gouvernement dans le but de démentir haut et fort, cette tentative  de corruption  des 40 millions de francs guinéens avec certains membres des Forces sociales par Kassory Fofana.

Justinmorel.info : Récemment vous étiez en tournée à l’intérieur du pays. Dites-nous quels en étaient les objectifs ?

Francis Haba : Depuis mars, nous avons entamé une vaste relance des activités de notre jeune parti politique et vous savez qu’on a perdu malheureusement notre  président, en la personne de M. Georges Gandhi Faraguet Tounkara,  qui nous a laissés un héritage assez lourd. Donc, nous avons décidé de relancer les activités et de remobiliser la base. C’est dans ce sens que  je suis allé personnellement à Boffa où j’ai fait deux jours avec les militants et sympathisants, j’ai rencontré la jeunesse de cette préfecture dans le but de regagner leur confiance. Et sachez que nous sommes allés aussi Boké  et  tant d’autres villes de l’intérieur du pays,  où nous avons installé les sections fédérales du parti.

Pour mieux m’expliciter, nous leur avons fait comprendre les nouvelles visions et le nouveau positionnement de notre jeune parti. Nous avons fait de même à Boké, malgré les remous  qui s’y déroulaient. Notre fédération et nous-mêmes, nous avons sillonné la zone, nous sommes allés à Kolabounyi et dans trois autres sous-préfectures de la ville de Boké, pour dire à nos militants de rester mobilisés. Et pour un peu booster leur élan puisque depuis la mort du président, il y avait un moment de silence que nous nous appelons un moment de deuil, mémé si nous avons participé à toutes les élections que notre pays a organisées depuis la création du parti.

Nous sommes aussi allés à Kamsar, nous avons compris à travers nos rencontres avec les populations, avec nos structures, qu’il y a eu une nouvelle génération en politique. Les populations ont besoin de voir émerger de nouveaux visages dans le paysage politique du pays. Elles étaient  très contentes et ravies  de notre présence dans leurs localités. Et,  elles  nous ont promis de toutes les façons que nous allons travailler  en concert et souhaité nous recevoir très prochainement.

justinmorel.info : Au cours de vos visites à l’intérieur du pays, la jeunesse de ces différentes villes vous a-t-elle exposé ses préoccupations majeures. Pouvez-vous nous en parler ?

Francis Haba : Les jeunes de toutes les localités où nous sommes passés, ont largement exprimé leurs préoccupations? Elles sont quasi communes: le manque d’emploi, la formation, la pauvreté, etc. Vous savez  que nous avons un régime extrêmement socialiste, alors ils ne savent pas créer de la richesse. Non seulement, ils ne savent pas créer les emplois, mais ils ne savent pas aussi distribuer cette richesse de façon équitable. Normalement quand on est un communiste ou socialiste, leurs spécialités devraient être la bonne distribution des richesses qui sont créées par l’Etat. Malheureusement, il y a de plus en plus de paupérisation des paysans, il y a un clan autour du pouvoir, toutes les richesses qui sont créées, ce sont eux qui les amassent, on ne sait pas où ça va.

Et donc, les populations ont besoin de travailler, elles  ont besoin que le pays soit beaucoup plus ouvert, elles ont besoin qu’elles soient beaucoup plus protégées, et elles ont besoin que les sociétés minières qui s’installent dans la zone, prennent en compte leurs préoccupations. Que des centres de santé soient construits, que leurs routes non bitumées, soient complètement refaites et  qu’elles aient la possibilité d’écouler leurs marchandises. Qu’elles  aient la possibilité de se soigner quand elles tombent malades. Ces cris du cœur nous lea avons entendu un peu partout .Nous leur avons promis de songer à leurs préoccupations majeures.

Nous sommes  de l’opposition donc, nous travaillons d’arrache-pied  pour l’alternance en 2020, nous ferons tout pour essayer d’apporter des solutions plus fiables et viables aux préoccupations majeures de ces populations qui n’ont plus d’espoir.

Justinmorel.info : L’opposition vient de suspendre ses manifestations, suite à un compromis politique qui a été signé récemment entre elle et la mouvance présidentielle, concernant le contentieux électoral au QG de l’UFDG. Quelle en est votre lecture ?

Francis Haba : il faut d’abord reconnaitre que cette situation de crise a été provoquée par le gouvernement,  la CENI et par certains juges locaux qui se sont permis de prendre des avis contraires aux urnes. C’est ce qui a fait perdurer cette crise post électorale pendant six mois. Qu’à cela ne tienne, il faut reconnaitre que, saluer tout à fait l’opposition Républicaine qui à la dernière minute, a compris qu’il fallait céder, qu’il fallait accepter de suspendre ses manifestations pour que la crise liée à cette communale-là soit définitivement réglée. Je pense que si cela a été accepté, c’est beaucoup plus en faveur des populations, beaucoup plus pour l’émergence démocratique.

S’il faut le reconnaitre, il ne faut pas que je trahisse ma propre conscience. Même, si cela a été fait totalement sur le dos de nos Lois. Parce qu’en tant que républicain, nous combattons pour la restauration  d’un Etat de droit. Mais, il ne faudrait pas que ce compromis politique soit une sorte de deal. N’est-ce pas qu’on dise: toi, tu prends telle commune,  toi aussi tu prends une autre commune, cela est une honte, il faut le dire!. Mais, il fallait en arrivé là parce que trop c’est trop, ça a trop duré!…

Justinmorel.info : Les principes de la nouvelle Loi sur le CENI ne permettent pas  à l’UGDD d’avoir une représentation au sein dudit organe. Est-ce que cela ne vous frustre pas… ?

Francis Loua : Certains de nos cadres étaient tous de mêmes frustrés. Mais après une longue réflexion, la position de l’UGDD a toujours été claire. Parce que nous voulons des gens avec des profils, avec des compétences que tous les partis politiques d’opposition devraient choisir pour les présenter auprès de l’administration publique, auprès de ministère de l’administration du territoire, comme candidats pour les postes de la CENI. Mais, il faut dire que cette Loi même si elle est exclusive, même si elle exclut certains partis d’opposition tout comme certains partis de la mouvance, elle a cependant un certain mérite. Le mérite de changer cette CENI qui est complètement corrompue. Le mérite de mettre une nouvelle CENI, peut-être qui ne va pas agir comme l’ancienne CENI.

Mais comme, je l’ai dit tant tôt, c’est une Loi qui a fait beaucoup de bruit et même au sein de notre bureau politique national, il a été difficile de tirer une conclusion. Finalement, on s’est  dit, l’essentiel, c’est qu’ils aient des hommes ou des femmes valables, républicains qui vont composer cette nouvelle CENI et qui permettrons à la Guinée d’avoir des élections libres et transparentes…

Justinmorel.info : Mais vous n’êtes pas sans savoir que cette nouvelle sur la CENI, est plus politique et non technique. Qu’en dites-vous ?

Francis Haba : vous savez notre pays vit une situation de rumeurs. Elle vit une situation de pessimisme, de façon que quelque soit la personne que vous mettez au niveau de la CENI, les gens vont toujours trouver en elle une couleur politique. Donc, la CENI technique pourrait avoir ce problème-là. Comment faire le choix d’une CENI technique ? Je pense que c’est cette question qui serait vraiment difficile à trancher.

C’est pourquoi, personnellement,  je suis ravi que ça soit une CENI politique de façon à ce que tous les partis politiques, en tout cas, toutes les entités, prennent part aux différentes élections; afin qu’ils puissent y être représentés.

Interview réalisée par Léon KOLIE pour JMI

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